La très charmante Emma Hooper fait son entrée chez Alto avec Les chants du large, un roman vif traversé par l’air salin des côtes terre-neuviennes. Afin de faire davantage connaissance avec cette touche-à-tout, nous nous sommes entretenus avec elle.

Lorsqu’on lui demande de se décrire un peu, Emma Hooper choisit de se comparer à un animal, à une loutre. Mais attention, « une loutre qui écrit des livres, joue de la musique et mène des recherches de temps en temps ».

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Oui, l’auteure est aussi musicienne. Né du désir de composer ses propres pièces, après avoir joué pour différents artistes au fil des ans (dont Peter Gabriel et Toni Braxton), Waitress for the Bees est son projet musical solo. « C’est essentiellement de l’alto, une loop station et du chant, mais il y a aussi un peu d’accordéon, de cloches à main et de scie musicale », précise-t-elle. Si son premier album parlait de dinosaures, son deuxième est consacré aux insectes, et elle pense déjà au troisième, qui tournera fort probablement autour des saints.

La musique est très importante pour Emma Hooper, qui s’y intéresse également d’un point de vue universitaire. Son sujet principal est la musique populaire et elle l’enseigne à l’Université de Bath Spa au Royaume-Uni. Elle prend un véritable plaisir à aider ses étudiants à trouver des moyens d’examiner de manière critique, créative et intelligente divers éléments de l’industrie de la musique populaire. « C’est super ! Les étudiants arrivent généralement terrifiés dans mon cours, mais en ressortent vraiment inspirés et étonnés par leurs propres capacités d’analyse universitaire lorsqu’il est question de sujets qui les passionnent. »

Plusieurs personnages des Chants du large jouent d’un instrument et le roman est émaillé de paroles de chansons. L’auteure explique qu’elle souhaitait faire vivre aux gens une expérience de lecture multimédia, un peu comme avec la bande sonore d’un film. Elle ajoute que la musique est « une part importante de [s]a vie, mais aussi de la plupart de nos vies ». Il lui semblait donc injuste de priver ses personnages de ce moyen d’expression et de communication.

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Le premier roman d’Emma Hooper, Etta et Otto (et Russell et James), a connu un immense succès et a été publié dans vingt-trois pays, rien de moins ! « Heureusement, relate l’auteure, j’avais déjà amorcé l’écriture des Chants du large quand les choses ont commencé à devenir excitantes pour EORJ. » Elle n’a donc pas souffert du blocage du deuxième roman dont sont affligés certains écrivains après un tel succès. « Bien sûr, c’est un peu angoissant de savoir que les gens vont inévitablement les comparer... mais c’est aussi libérateur. Le fait d’avoir obtenu une reconnaissance artistique signifie que je n’ai plus besoin de me battre pour me prouver, maintenant. Je peux prendre des risques plus librement, croire en mes forces et en mes idées farfelues. »

Véritable Bob Ross dans l’âme, Emma Hooper puise son inspiration dans les paysages. « Mes deux romans ont germé à partir d’une idée d’un endroit, de ses couleurs, de son climat, de ses odeurs, de ses saisons, de sa flore, etc. Jusqu’ici, les lieux me sont toujours venus en tête avant les personnages. »

C’est dans un village côtier de Terre-Neuve qu’est campée l’histoire des Chants du large. Les poissons ayant déserté les eaux, l’économie du hameau, qui reposait essentiellement sur la pêche, s’effondre, et les habitants sont forcés à l’exode. Mais certains, tels de vrais Gaulois, s’accrochent. Parmi eux, la famille Connor, plus particulièrement le jeune Finn qui, par tous les moyens, tentera de faire revenir les poissons.

Ayant elle-même choisi de quitter le Canada pour s’établir en Angleterre, Emma Hooper est familière avec ce dilemme, bien que, contrairement à ses personnages, elle n’ait jamais été contrainte de partir. « Le choix entre le confort du nid familial et l’envie d’élargir ses horizons en est un auquel nous sommes tous confrontés, et la décision que l’on prend nous définit, de même que notre vie, de manière plus forte que presque n’importe quoi d’autre. »

Ce roman aurait pu être bercé d’une triste mélodie, mais l’auteure a su y insuffler une part lumineuse, notamment grâce à la grande créativité dont font preuve certains personnages, les plus jeunes surtout. Cora, l’aînée de la famille Connor, se désennuie en métamorphosant les maisons abandonnées, leur donnant les couleurs de pays lointains. Finn, de son côté, s’occupe à essayer d’attirer les poissons, et les moyens qu’il trouve n’ont rien de banal ! « J’étais si chanceuse d’avoir des parents qui autorisaient – et encourageaient – les comportements imaginatifs, créatifs et parfois bizarres, voire limite transgressifs. Je pense que c’est très triste que les enfants grandissent et se distancient de cette espèce de manque d’inhibition créative, et je me sens extrêmement reconnaissante d’y avoir échappé... Je ne crois pas que je serais écrivaine autrement. »

Superbe ode à l’imagination et à l’élan de la jeunesse, Les chants du large est tout à fait rafraîchissant, comme son auteure à qui l’on souhaite de chanter encore longtemps, d’une voix qui porte loin.

Emma HOOPER

Les chants du large

Trop de silence et trop de nuit pour la musique, trop d’appels de la mer pour lire. Il n’y avait rien d’autre à faire que raconter des histoires.

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